dimanche 3 juillet 2011

"Le Mépris" de Jean-Luc Godard


La plus belle scène du film est un voyage en barque vers l’infini. L’émotion envahit le visage ordinairement arrogant de Michel Piccoli. Amour transi, amour violent, son regard brille de ce feu que sut si bien capter Claude Sautet. Il caresse une dernière fois la douce image de Brigitte Bardot qui semble, dans ce plan hors du temps, avoir échoué par accident sur les rives d’un film de Joseph Losey. L’œil pénètre doucement dans le subconscient d’Alberto Moravia, une grotte aux mille facettes vermeilles. Piccoli pose le pied sur le rivage vierge de ce film jusqu’ici solaire et s’émerveille de cette explosion de couleurs sanguines, espérant, dans la solitude de cette caverne isolée, faire renaître une passion oubliée. Il se retourne vers l’onde obscure, tendant les mains vers celle qui constitue l’intrigue, l’histoire, le cinéma, mais ne fait face qu’à un écran noir d’où ne jaillit aucune lumière. Nous attendons désespérément avec lui que se réveille de ce cœur de pierre la braise qui enflamma le cinéma d’Elia Kazan, mais le silence règne sur cette scène qui ne fut qu’un rêve. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire