mercredi 23 août 2017

"Ecrire ou mourir" de Michel Houellebecq


Ecrire est un cri que personne n'entend, une bouteille à la mer que la mer emportera. C'est à toi que je m'adresse, toi qui m'attend là-bas. Je t'écris la critique d'un film qui ne verra jamais la nuit. Une missive lancée vers l'inconnue. Imagine un mouvement lent, un son assourdissant. Regarde ton écran. Tu saisis? Je suis dans les entrelacs de son scintillement. Discontinu, je ne fais sens qu'une fois sur deux. A nous deux nous ferons sens.

Ecrire est un cri qui ne fait aucun bruit. Entends-tu la mer emporter tes sens? Je m'adresse à une adresse inconnue et attends que la nuit déroule son film. Un mouvement assourdissant. Me vois-tu scintiller dans la lenteur de notre pas de deux? A nous deux nous referons le monde sur grand écran. 

Ecrire c'est aimer l'inconnu, boire tout son soûl. Je t'envoie ce missile qui te mettra à nu. Je vois ton corps se mouvoir lentement et m'inviter dans la danse. Je ferme les yeux et savoure l'explosion de mes sens. C'est tout. 

Ecrire c'est vivre maladroitement. Un peu de sens, un peu de bruit qui résonne à l'infini. A chaque mot je renais, je fuis. A chaque ligne je perçois la suivante qui m'emportera vers un horizon vague. 

Ecrire c'est mourir aux yeux de tous. Lentement. Infiniment. Je divague. Si j'avais su. Si j'avais bu. A nous deux nous aurions tout fait au vu et au su de tous. Nous nous serions aimés entre la mer et l'horizon, dans les yeux, à l'unisson. 

Le temps d'un film.

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