lundi 10 octobre 2011

"Drive" de Nicolas Winding Refn



Faussement naïf comme une chanson pop des années 80, le film s’insinue avec grâce sur les routes dangereusement glissantes du mélo. Puis, soudain, elle surgit, elle, la violence. Elle surprend, déstabilise, nous gênerait presque. Heureusement Ryan Gosling crève l’écran de ses silences et porte sur ses traits enfantins la dureté angélique de James Dean, celui qui voulait vivre à tout prix, à cent à l’heure, au péril de sa vie. Même dans sa démesure, le film reste à la mesure de cet acteur hors norme et nous rappelle que le cinéma, dans ses frustrations, ses coups de sang, ses actes manqués, ses difficultés à conclure, est avant tout l’expression d’un désir insatisfait.     

"Melancholia" de Lars Von Trier



Tout débute par un rêve, une pluie de passereaux, la chute d’un étalon, des scènes au ralenti, deux femmes et un enfant, plan où l’équilibre est parfait, mais où l’homme est absent. Il regarde. Il essaie de donner un sens à une pensée folle. Il est cette planète lancée à grande vitesse dans le vide sidéral, mais le choc avec l’humanité ne sera pas fatal. Il n’aura même pas lieu. Lars Von Trier n’y croit pas vraiment et se force à plonger son film dans le néant. Cette pensée folle, au fond, il ne l’accepte pas car il ne la comprend pas. Et c’est sans nul doute de ce désir de donner sens à cette vision brute, vague souvenir d’un songe incompréhensible, qu’est né ce film. Froid comme l’art abstrait, détaché comme la mariée, sec comme sa sœur, naïf comme le mari déçu, dogmatique comme le beau-frère, cynique comme le patron vénal, Lars Von Trier est ce qu’il dénonce. Incapable de voir au-delà de la surface sensible, il creuse comme un acharné le cœur des hommes qu’il ne sait pénétrer de sa raison. En diabolisant le monde et en dénigrant l’humanité, Lars Von Trier fait preuve de peu de foi en la magie du cinéma et la fée qui l’anime, la vie. Si comme Justine, la future ex-mariée, il pense être convaincu de notre solitude éternelle et de notre fin inéluctable, pourquoi ne se mure-t-il pas dans le silence ? Parce qu’il veut continuer, à vivre, à filmer les seins plantureux de Kirsten Dunst, le visage déchiré de Charlotte Gainsbourg, la vanité de Kiefer Sutherland, les facéties de John Hurt, l’amertume de Charlotte Rampling. Parce qu’il veut rendre compte de ses rêves, de l’invisible, comme ses maitres, Bergman, Tarkovsky, Fellini. Cela ne sert à rien de déconstruire le monde et de chercher le néant dans le noir de sa pensée. Le cinéma est fait de lumière et Dieu sait qu’elle est belle dans Melancholia ! Que Lars Von Trier brise le carcan de son intellect, de ses dogmes, et qu’il laisse enfin la vie s’épanouir pleinement sur l’écran, celle qu’il chérit tant, tout comme ses actrices, toutes les femmes de sa vie et celle qu’il, entre toutes, aime à la folie : l’humanité.



"Arrietty" de Hiromasa Yonebayashi



Les yeux tournés vers le ciel, elle se sent si minuscule, presque invisible, face à son désir, ce géant, ce soleil qui ne pourra malheureusement jamais pénétrer son secret. A jamais exclue du monde des hommes, la muse est cependant heureuse d’avoir su braver sa peur et supporter le regard de l’impossible.


"La piel que habito" de Pedro Almodóvar



Isolée au sein d’un corps étranger, la conscience fait son monologue intérieur dans un silence de cathédrale, vit sa vie sans pouvoir sonder son propre cœur et observe son semblable comme une bête fauve, le reflet d’un reflet dans un miroir déformant. Des yeux sans visage. Dans le corps de l’un, dans le corps de l’autre, la solitude cherche vainement une fin à son histoire.